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5G : Trump intensifie la pression

par Etienne Henri
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La 5G n’est décidément pas une technologie comme les autres. Alors que la 3G et la 4G étaient restées inconnues du grand public lors de leur conception et de leur déploiement, puis progressivement intégrées aux terminaux mobiles et aux offres commerciales, la 5G est hypermédiatisée avant même d’avoir pointé le bout de son antenne.

Cette évolution des normes de télécommunications fait l’objet de tous les fantasmes tant au niveau de ses promesses (de l’Internet instantané, partout, et pour tous) que de ses enjeux sociaux (avec les menaces d’espionnage généralisé de Pékin en cas d’utilisation des équipements chinois).

Pas étonnant que Donald Trump s’empare à bras-le-corps du dossier et multiplie, comme à son habitude, les prises de positions tranchées.

Cette année, l’administration Trump s’est prise d’amour pour la 5G made in America. Après avoir tiré à boulets rouges sur les équipementiers Huawei et ZTE durant des mois, la Maison-Blanche passe à la deuxième phase de l’offensive en souhaitant accélérer le déploiement de la 5G sur le territoire nord-américain avec des technologies locales.

Elle a également ajouté Huawei et soixante-dix de ses affiliés à la liste noire des entreprises avec lesquelles il est interdit de commercer. Désormais, les entreprises américaines ne peuvent plus intégrer de composants Huawei dans leur produits et Huawei ne peut plus intégrer de composants américains dans ses produits. Cela vaut pour le hardware comme pour le software. C’est ce qui avait mis ZTE à genou l’an dernier.

La Maison-Blanche ne veut pas d’une 5G chinoise

Les Etats-Unis font tout pour favoriser l’émergence d’une 5G 100 % nord-américaine.

Dans un premier temps, les équipementiers chinois ont été désignés comme étant à la solde de Pékin, et l’administration n’a eu de cesse de multiplier les obstacles législatifs pour empêcher les opérateurs de télécommunication américains d’acheter leurs appareils. A l’international, ce lobbying anxiogène s’est avéré efficace puisque même l’Europe exprime désormais sa méfiance face aux solutions asiatiques. Il semblerait que le Vieux Continent s’oriente vers des règlementations sévères plutôt que vers une interdiction totale, mais le mal est fait : grâce à Washington, la confiance envers Huawei et ZTE est définitivement brisée.

Non contente d’inciter les opérateurs à ne pas installer d’équipements réseaux conçus hors du territoire américain, la Maison-Blanche s’implique désormais ouvertement pour que le réseau 5G devienne opérationnel dès cette année.

La FCC (agence en charge de la régulation des télécommunications) a annoncé débloquer dans l’année trois bandes de fréquence situées aux alentours des 37 GHz, 39 GHz et 47 GHz afin de permettre aux opérateurs de couvrir une large part du territoire rural des Etats-Unis.

Les raisons d’un déploiement accéléré

Il est toujours difficile de distinguer, dans la politique de Donald Trump, ce qui relève du calcul à long terme des simples manifestations de l’égo.

Au niveau économique, les enjeux sont clairs. Avant la passe d’arme entre l’administration américaine et les constructeurs chinois, les opérateurs téléphoniques occidentaux (aux Etats-Unis comme en France) penchaient pour les équipements asiatiques. Huawei devait être le grand gagnant de la course à la 5G avec ses offres clé en main, couvrant l’ensemble des besoins en infrastructures terrestres.

Nokia (FI0009000681 – NOKIA) et Ericsson (US2948216088 – ERIC) semblaient contraints à jouer un rôle secondaire et à grappiller des miettes de marché sur quelques équipements de niche. Les choses ont bien changé, et les contrats pleuvent désormais sur les entreprises européennes.

En Italie, Wind-Tre a écarté ZTE et a signé un contrat de 600 M€ avec Ericsson. Aux Etats-Unis, Ericsson et Nokia ont signé conjointement un contrat de 3,5 Mds$ avec T-Mobile. D’autres pays leur emboîteront le pas : l’Australie, la Nouvelle-Zélande et le Japon ont annoncé leur intention d’écarter les constructeurs chinois de leurs appels d’offres.

Ce chamboulement du marché des équipements 5G est sans aucun doute une belle victoire pour Washington. Pourtant, cette guérilla législative (et médiatique) ne semble pas satisfaire l’administration américaine. Douterait-elle de l’efficacité à long terme de cette stratégie? Donald Trump veut-il « faire payer » la Chine autrement que par la simple perte de marchés se chiffrant en milliards de dollars ? La question de la souveraineté des équipements de communication est-elle vraiment prépondérante pour l’administration ?

Quelles que soient ses raisons, l’administration américaine ne semble plus se satisfaire d’avoir écarté Huawei et ZTE de la première vague de commandes d’équipements. En mettant aux enchères de nouvelles fréquences, elle espère accélérer le déploiement de la 5G sur le territoire américain… et commet par la même une énorme erreur stratégique, comme nous le verrons dès demain…

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