La semaine dernière, une poignée d’investisseurs, parmi nos plus fidèles lecteurs, a rejoint nos équipes en Normandie pour un séminaire ultraconfidentiel dédié à l’investissement en temps de crise. A cette occasion, nos experts ont fait le point sur la situation actuelle et dévoilé ensuite, tour à tour, les meilleurs plans d’actions pour absorber le choc tout en en profitant…
La semaine dernière, quelques lecteurs triés sur le volet ont rejoint les équipes des Publications Agora au château de Courtomer pour un séminaire ultraconfidentiel dédié à l’investissement en temps de crise. Dans une ambiance feutrée, mais néanmoins studieuse, les experts se sont succédé pour évoquer la situation actuelle et la meilleure manière d’investir durant les six prochains mois.
Le château de Courtomer a accueilli les experts des Publications Agora
et des membres du prestigieux Cercle Agora
Conférences, table ronde, séance de questions/réponses, les occasions d’échanger et débattre n’ont pas manqué. Si, comme souvent, les opinions étaient variées et les discussions parfois animées, un consensus s’est tout de même dégagé : la période exceptionnelle que nous traversons nécessite de mettre en place des stratégies d’investissement tout aussi exceptionnelles.
Aujourd’hui, parce que la situation est inédite, je partage avec vous le cœur de mon intervention durant ce séminaire. Parce que c’est votre épargne qui est en jeu cet hiver, il est important que vous puissiez prendre vos décisions d’investissement en connaissance de cause.
La crise est là… et on ne vous a pas tout dit !
Le manque criant d’énergie que traverse l’Europe est désormais connu de tous. Chacun sait maintenant que nous ne passerons pas l’hiver 2022 aussi confortablement que les années passées. Même le Président de la République a osé briser le tabou de la pénurie en prenant acte de « la fin de l’abondance » et la nécessité de « baisser notre consommation d’énergie de 10 % ».
Le Président de la République nous dit de nous préparer à un choc économique équivalent à deux fois celui du premier confinement
Mais abondance et sobriété sont des notions relatives. Et qui sait vraiment ce que représente une baisse de 10 % de la consommation d’énergie ?
Un pays développé a expérimenté la sobriété énergétique. Ce pays a réduit en quelques mois sa consommation d’énergie primaire de 6 %. Ce faisant, il a connu une crise économique d’ampleur historique avec une contraction du PIB de 7,1 %. Ce pays… c’est le nôtre. Il s’agit de la France de 2020, qui a subi un choc économique sans précédent dans sa lutte contre le coronavirus.
Et si l’ordre de grandeur évoqué par Emmanuel Macron d’une baisse de 10 % est globalement correct, les calculs approfondis montrent qu’il faudra plutôt s’accommoder de gré ou de force d’une baisse de la disponibilité énergétique de 12 % à 15 %.
Dans un silence médiatique étonnant, le Président de la République nous dit donc de nous préparer à un choc économique équivalent à deux fois celui du premier confinement. Les chiffres sont abstraits mais la réalité sera bien tangible.
Pour économiser 10 % d’énergie, il ne suffit pas de faire quelques petits gestes sur les sujets qui nous touchent le moins (température de chauffage, déplacements en voiture, en avion, quantité de viande mangée dans la semaine). Il faut baisser l’intégralité de sa consommation de 10 %. Cela veut dire se déplacer 10 % moins, chauffer 10 % moins, construire des maisons 10 % moins grandes, verser des aides 10 % moins importantes aux personnes qui dépendent de nous… Bref : réduire notre niveau de vie total de 10 %. Bien peu de citoyens en ont conscience – et bien peu d’investisseurs réalisent ce que cela représente pour les profits des entreprises.
Alors que la facture du « quoi qu’il en coûte » sanitaire commence tout juste à être payée, que nous ne pourrons plus utiliser le joker de la dette publique pour demander à nos enfants de payer demain notre niveau de vie d’aujourd’hui, et que nos entreprises sont fragilisées par les dettes souscrites durant le COVID-19, nous sommes au-devant d’une contraction économique colossale.
Et elle a déjà commencé…
La pénurie est déjà là
Les Candide de l’énergie voient dans le récent reflux du prix du pétrole, et de certains contrats à terme sur l’électricité, la preuve que l’économie ne manque pas d’énergie et que les traders s’étaient simplement fait peur. C’est méconnaître le pourquoi de cette baisse.
C’est un fait : les prix de l’énergie baissent lorsque la demande s’aligne sur l’offre. Mais, si les volumes demandés redeviennent compatibles avec les volumes disponibles, c’est pour la pire raison qui soit, parce que la demande a été détruite.
De nombreuses lignes de production ne sont plus capables de fonctionner en étant rentables
Il ne se passe plus une semaine sans que nous apprenions qu’un industriel européen a mis sa production en suspens. Dépendantes d’énergies dont le prix a été multiplié par 5, 10 ou même 20 en un an, de nombreuses lignes de production ne sont plus capables de fonctionner en étant rentables. Les industriels n’étant pas masochistes, vient un moment où il vaut mieux mettre à l’arrêt des sites entiers et demander aux employés de rester chez eux que de continuer la production.
Et ce n’est que le début. Aluminium, acier, engrais azotés, chimie industrielle… les sites les plus consommateurs d’électricité sont aussi ceux qui produisent des matières premières vitales.
Une chose est certaine, cet effacement de la demande en énergie n’est pas une bonne nouvelle. Pour les entreprises concernées, l’exercice 2022 sera catastrophique. Les investisseurs se cachent encore derrière leur petit doigt en espérant que l’hiver sera doux et que la demande en énergie non productive (chauffage, éclairage des enseignes la nuit) sera suffisamment basse pour permettre à l’industrie de tourner à plein… mais ce n’est déjà plus le cas.
La pénurie a déjà débuté et les maillons les plus faibles ont commencé à lâcher. La seule inconnue est jusqu’à quel niveau la chaîne de valeur globale sera impactée.
Ne boudez pas les actions pour autant !
Les investisseurs les plus aguerris n’ont été qu’à demi-surpris lorsque je leur ai démontré, durant le séminaire, que la pénurie était déjà là et que les effets sur l’économie réelle étaient déjà tangibles. Après tout, j’alertais dès le mois de mars les lecteurs de Zéro Carbone Millionnaire sur l’imminence d’une crise énergétique sans précédent – ce qui leur a d’ailleurs permis de réaliser d’importants gains en pleine baisse des marchés.
En revanche, après m’avoir entendu dépeindre ce tableau inquiétant, ils ont été abasourdis de m’entendre conseiller de rester investis en actions cet hiver.
Voilà pourquoi je leur ai donné ce conseil contre-intuitif que je tiens à partager avec vous aujourd’hui.
La crise énergétique menace de nous faire perdre une décennie de croissance. Il est possible qu’il faille attendre 2025, voire 2030, pour retrouver des niveaux de production industrielle comparables aux années 2010 si nous n’arrivons pas à basculer notre consommation d’énergie fossile vers les renouvelables.
Face à l’idée de cette décennie perdue, la tentation est forte de sortir des marchés boursiers pour plusieurs années.
Le problème avec cette stratégie est que les raisons ne manquent pas de se débarrasser de ses actions tous les dix ans. En 2010, la crise bancaire et la purge (incomplète) des entreprises zombies incitaient à rester à l’écart des actions. En 2001, la crise des dot.com laissait présager des faillites en cascade dans l’économie réelle et la fin du miracle numérique. Avant, en 1991, la guerre du Golfe marquait les esprits et nous faisait craindre un embrasement mondial peu propice aux investissements de long terme. En 1881, l’élection d’un Président de la République socialiste inquiétait les investisseurs quant au respect de la propriété privée – en particulier pour les détenteurs d’actions de fleurons industriels. Et, en 1973, c’est le choc pétrolier qui signait la fin de l’abondance énergétique.
Garder ses actifs sous forme de liquidités est la garantie de s’appauvrir
En bref, les investisseurs avisés ont eu l’occasion de rester, pour d’excellentes raisons, au-dehors des marchés depuis un demi-siècle. Ce faisant, ils ont raté la tendance fondamentale à la hausse qui a propulsé le S&P 500 de 120 points à 4 500 points.
Nul doute que nous allons au-devant d’une crise économique significative. Nul doute que les indices pourront corriger lorsque les investisseurs en prendront conscience.
Mais il est tout aussi certain que cesser d’investir en attendant que l’horizon soit radieux est le plus sûr moyen de ne jamais investir. Et, avec une inflation réelle de l’ordre de 10 % par an, la sécurité offerte par le cash est toute relative. Rester investi en actions est risqué, garder ses actifs sous forme de liquidités est la garantie de s’appauvrir. Pour cet hiver, préparons-nous au pire mais restons optimistes sur les capacités de résilience de notre économie et de nos sociétés.