Pour atteindre la neutralité carbone, à horizon 2050, nous n’aurons d’autres choix que d’accélérer toujours plus notre transition énergétique. Sur le front des énergies renouvelables, les panneaux photovoltaïques offrent un rendement et des perspectives incomparables. L’installation de nouvelles capacités de production d’électricité d’origine solaire bat donc son plein. Si la Chine domine le marché, en France, la préférence nationale regagne du terrain…
L’installation de nouvelles capacités de production d’électricité d’origine solaire bat son plein
Comme déjà dit, d’un point de vue énergétique les panneaux solaires offrent un rendement et des perspectives incomparables. Tout naturellement donc, l’’installation de nouvelles capacités de production d’électricité d’origine solaire bat son plein.
En effet, sur la seule année 2021, plus de 2 GW de panneaux photovoltaïques ont été posés en France. Cela représente plus du double des installations menées en 2020, et plus de puissance que n’aura la future centrale nucléaire EPR de Flamanville.
Si ces chiffres peuvent sembler importants – et ils le sont dans l’absolu –, pour atteindre le zéro carbone à horizon 2050, nous n’aurons d’autres choix que d’accélérer plus encore la cadence. Ainsi, en moins de trente ans, nous devrons avoir posé et relié au réseau pas moins de 100 GW de panneaux solaires. Pour ce faire, il nous faudra, au bas mot, décupler le nombre de panneaux solaires sur notre territoire.
Mais, si le Vieux Continent dispose d’assembleurs et d’installateurs de panneaux solaires, les cellules photovoltaïque, cœur du dispositif chargé de convertir l’énergie solaire en électricité, sortent dans leur quasi-totalité des usines de l’empire du Milieu. Serions-nous en train d’échanger notre dépendance aux hydrocarbures contre une dépendance accrue aux usines chinoise ?
Pas forcément. Pour assurer notre souveraineté énergétique, et améliorer notre balance commerciale, des entrepreneurs travaillent à la mise en place de capacités de production hexagonales. En produisant les cellules photovoltaïques sur notre territoire, nous pourrions ainsi effectuer notre transition énergétique avec des produits 100 % Made in France. C’est le pari que font REC Solar France et Carbon.
Le pari pas si fou de la relocalisation
La transition énergétique est avant tout une affaire d’argent. Au vu des montants en jeu, qui se chiffrent en milliers de milliards d’euros, les clients choisissent leurs approvisionnements à l’aune du retour sur investissement.
Le Made in China est devenu incontournable dans la production d’électricité solaire
C’est donc naturellement que les panneaux photovoltaïques produits en Chine ont progressivement raflé la quasi-totalité des ventes mondiales. Avec un coût de production imbattable tout en offrant une durée de vie tout à fait convenable, le Made in China est devenu incontournable dans la production d’électricité solaire. L’empire du Milieu capte en effet aujourd’hui 79 % du marché mondial des panneaux solaires assemblés, et plus de 97 % des cellules photovoltaïques.
Mais les avantages de la Chine pourraient bien s’éroder suffisamment pour laisser la place à quelques acteurs locaux. Entre l’isolement du pays (les frontières restent quasi-fermées depuis 2020), les hoquets de la chaîne logistique internationale, et une forte inflation du coût de la main-d’œuvre, l’avantage de construire de nouvelles lignes de production sur place pour l’exportation est moins évident que par le passé.
Evolution du salaire moyen annuel chinois, en yuan, qui a doublé sur 10 ans. Dans le même temps, le SMIC français n’a augmenté que de 17 %… (source : TradingEconomics/Bureau of Statistics of China)
Or, dans cette industrie en tension qu’est celle de la transition énergétique, c’est le prix des capacités marginales de production qui importe. Certes, les usines chinoises qui existent continueront de tourner à plein régime et de produire des panneaux à bas prix… mais il n’est pas dit que le coût d’installation de capacités supplémentaires soit encore plus intéressant à l’autre bout de la planète que dans nos frontières.
REC Solar France, du high-tech local
REC Group, entreprise fondée en Norvège et désormais propriété de l’Indien Reliance après avoir battu pavillon chinois entre 2015 et 2021, est un pur produit de la mondialisation technologique. Avec son site de Singapour doté d’une capacité de production de 2 à 3 GW de panneaux solaires et son usine aux Etats-Unis (1 GW), le groupe ne s’encombre pas de patriotisme économique ou du poids du passé lorsqu’il s’agit d’installer de nouvelles lignes de production.
A contre-courant des idées reçues qui clament que la France est incapable d’être compétitive sur la scène internationale, REC Group a choisi notre pays, et plus particulièrement Sarreguemines (Moselle), pour installer sa prochaine giga-factory. Eh oui !
Après Singapour, la Moselle accueillera la prochaine giga-factory de REC Solar (photo : REC Group)
Les panneaux de REC Solar produiront plus que la concurrence
Elle devra produire, en année pleine, plus de 2 GW de modules photovoltaïques dernier cri. Se basant sur la technologie de rupture de l’hétérojonction (HJT), ils auront un rendement de conversion de plus de 22,5 %. Et il passera à 26 % d’ici 2030. Toutes choses égales par ailleurs, les panneaux de REC Solar France produiront plus d’électricité que ceux de la concurrence, et pourront générer de l’électricité 5 % à 10 % moins chère que la technologie mono PERC actuelle.
Au cœur de l’été, REC Solar a obtenu une subvention de la part de l’Union européenne pour construire sa giga-factory de Moselle. Si le montant exact perçu par l’entreprise n’a pas été communiqué, nous savons que 18 lauréats vont se partager l’enveloppe de 1,8 Md€ allouée par l’Union européenne dans le cadre du Fonds d’innovation, ce qui laisse penser que le groupe touchera un financement de l’ordre de 100 M€.
Carbon mise sur les gros volumes
Face à l’excellence technologique de REC Solar, la jeune startup Carbon veut se différencier en misant sur la maîtrise de l’outil industriel. Plutôt que de s’engager dans la recherche de pointe pour améliorer de quelques pourcents l’efficacité de ses panneaux photovoltaïques, Carbon veut construire des panneaux dotés de technologies éprouvées.
L’entreprise ne se battra alors pas sur le rendement brut des installations, mais sur le rapport énergie/prix. Car ces panneaux, moins innovants que ceux de REC Solar, pourront être vendus à des prix bien plus compétitifs. Pour y parvenir, la startup profitera d’économies d’échelles offertes par l’utilisation de technologies matures et d’un volume de production sans commune mesure avec ses concurrents.
Son président et cofondateur Pascal Richard – ancien d’Alcatel, Total et SMA – voit en effet grand. Pour lui, la jeune pousse basée près de Saint-Etienne sera en mesure de produire 20 GW par an à horizon 2030. Et dès 2025, elle devrait faire sortir de ses lignes de production pas moins de 5 GW de panneaux par an.
Atteindre de telles cadences sera un défi financier et industriel
Atteindre de telles cadences sera un défi financier et industriel. Pour la direction, Carbon a besoin de 1 Md€ pour atteindre la première cadence de production, et cinq fois plus de capitaux pour atteindre les 20 GW/an.
Pour y parvenir, il faudra faire feu de tout bois. Financements européens comme REC Solar, guichets régionaux et soutiens à l’innovation français ne seront pas de trop pour parvenir à boucler les plans de financements. Cet été, la direction a indiqué dans la presse économique préparer une levée de fonds « avant la fin de l’année ». Elle pourrait être l’occasion, pour les investisseurs particuliers, de participer à la naissance d’un fleuron tricolore du panneau photovoltaïque low cost.
Ce positionnement aurait semblé totalement farfelu dans les années 2010, mais les limites de la mondialisation et l’accélération de la transition énergétique européenne le rendent, dans le contexte actuel, tout à fait crédible.