L’année 2019 n’est pas encore terminée qu’elle s’annonce déjà comme celle de tous les records pour les fintechs, le secteur des startups de services financiers.
C’est désormais une certitude : les grands réseaux bancaires n’ont qu’à bien se tenir. Après l’arrivée des banques en ligne offrant comptes et cartes de crédits gratuits, voici venu l’ère des startups qui proposent tous ces services sur des applications mobiles.
Votre argent, plus dématérialisé que jamais, peut désormais être reçu, transféré et épargné depuis votre smartphone de façon simple et ludique. Des interfaces minimalistes (donc conviviales) vous invitent à suivre vos comptes et prévoir vos dépenses de façon régulière.
Oubliez les agences bancaires locales poussiéreuses où votre conseiller n’est jamais le même d’une fois sur l’autre et où l’attente au guichet vous fait perdre patience. La banque mobile de 2019 est virtuelle, les encaissements de chèque se font à distance et votre conseiller vous répondra par e-mail d’on ne sait où, dans l’heure.
Le grand public est convaincu : les trois leaders européens (Revolut, N26 et Monzo) comptent désormais plus de 15 millions de clients. De leur côté, les investisseurs se frottent les mains : le secteur est en pleine effervescence et les levées de fonds se multiplient.
Quand les fintechs n’ont plus de prix
Dire que les actions des fintechs s’arrachent serait un euphémisme. Depuis le mois de janvier, Monzo a levé 144 M€ et N26 470 M€.
De son côté, Revolut pouvait sembler peu gourmande en capitaux avec « seulement » 302 M€ levés depuis sa création pour plus de 7 millions de clients… La startup ne compte pourtant pas se laisser distancer par des concurrents qui seraient devenus plus capitalisés : la rumeur indique qu’elle serait en train de préparer une levée de fonds record.
Selon Bloomberg, elle aurait mandaté JPMorgan Chase pour préparer un tour de table de 1,5 Md$ (500 M$ d’actions et 1 000 M$ d’obligations convertibles). Une telle levée valoriserait l’entreprise entre 5 Mds$ et 10 Mds$, et la fintech serait à deux doigts d’atteindre le statut tant convoité de « décacorne », ces rares licornes dont la valorisation s’exprime avec onze chiffres…
Cette performance laisse rêveur lorsque l’on sait que Revolut n’a été fondée qu’en 2015, et que la vénérable Société Générale n’est aujourd’hui valorisée que 22 Mds€.
Quelle place reste-t-il pour l’innovation ?
Avec des leaders dont la valeur devient comparable à celle de banques centenaires et qui comptent déjà des millions de clients, reste-t-il encore de la place pour les nouveaux entrants ?
C’est ce que veulent croire certains entrepreneurs et investisseurs. Le petit Poucet Starling Bank a annoncé voici quelques jours avoir levé 30 M£ (soit près de 33 M€) pour développer son activité. La néo-banque offre un service classique de compte courant accessible depuis une application mobile, qu’elle a agrémenté d’un outil de suivi de dépenses avec alertes prédictives – et étendu aux PME. Elle revendique désormais près d’un million de clients actifs.
Alors que pleuvent des dizaines, voire des centaines de millions d’euros sur les fintechs, nous ne pouvons que constater que les offres se tiennent dans un mouchoir de poche. Le combat ne se joue pas tant sur la richesse des services offerts, qui doivent par définition rester simples, que sur le terrain de l’acquisition de clients.
Le modèle Amazon appliqué à la banque
Les fintechs ont désormais quitté le monde de l’innovation pour entrer dans celui de la finance. Les entrepreneurs du secteur profitent de la présence d’investisseurs rompus aux calculs de rentabilité qui n’hésitent pas à déverser des montants colossaux lorsqu’ils jugent les entreprises potentiellement rémunératrices.
Aujourd’hui, la question n’est plus « que proposer aux clients » mais « combien de clients pourrons-nous acquérir ». Les fintechs opèrent toujours à perte, et le capital injecté sert uniquement à les faire survivre le plus longtemps possible.
Face à l’arrivée de ces jeunes entreprises prêtes à tout pour capter des parts de marché, il serait tentant de condamner les anciens acteurs. Il est évident que le business model des banques de détail avec leur maillage d’agences et leurs frais de tenue de compte élevés ne pourra pas survivre si les néobanques s’implantent durablement dans le paysage. C’est d’ailleurs ce qu’a anticipé le marché en envoyant au tapis les actions de quasiment toutes les banques européennes… au point de les brader totalement.
La Société Générale, par exemple, ne cote plus que six fois son résultat net et offre un rendement annuel supérieur à 8,5 %. Le marché fait déjà comme si les banques historiques allaient disparaître d’ici 2025 sans laisser aucun actif derrière elles. Vous pensiez vendre à découvert les actions des grandes banques pour profiter de leur chute ? Il est trop tard – leurs actions ne valent déjà plus grand-chose.
Ce consensus donne une opportunité rare aux plus contrariens d’entre vous : il est aujourd’hui possible de profiter de l’incertitude que font planer l’arrivée des fintechs, et l’avenir de la zone euro, pour acquérir quelques actions bradées des grands réseaux bancaires.
En plus de vous apporter un rendement des plus confortables, elles pourraient être à la veille d’un important rebond. Le marché semble réaliser son excès de pessimisme des derniers mois : la Société Générale, qui vient d’annoncer des résultats pourtant médiocres pour le dernier trimestre avec 23 fermetures d’agences et un résultat net en baisse de -34 %, est en hausse de plus de 22 % sur trente jours.
Le titre reste, malgré cette hausse fulgurante, quasi moitié moins cher que ce qu’il n’était en 2017 alors que le contexte économique était comparable. Un retour sur ces niveaux vous offrirait une plus-value de 164 %. Nous pouvons remercier les fintechs d’avoir participé à cette panique généralisée qui nous offre une opportunité d’achat peu commune !