[Record battu ! Des scientifiques japonais viennent de pulvériser le record mondial de vitesse internet. Une prouesse garantie sans Halo-Fi – sans constellation satellitaire donc (coucou Starlink) – mais 100% avec fibre optique… Cette performance dépasse largement tous les standards industriels actuels et ouvre la voie à un Internet à vitesse décuplée. Quel impact aura-t-elle sur l’Internet mondial ?]
Les scientifiques du National Institute of Information and Communications Technology (NICT), au Japon, ont réussi la prouesse de transmettre des données sur une longue distance à une vitesse encore jamais vue. En utilisant un nouveau type de fibre optique, ils sont parvenus à maintenir une vitesse de 319 térabits par seconde (Tb/s) sur plus de 3 000 kilomètres de distance. Ils pulvérisent ainsi le record mondial établi l’année passée (178 Tb/s) qui avait lui-même supplanté le précédent record (44 Tb/s).
Le record de vitesse que vient d’établir le NICT dépasse largement tous les standards industriels
Infographie : NICT
Cette performance ouvre la voie à un Internet à vitesse décuplée par rapport aux installations actuelles, et pourrait justifier de nouveaux investissements massifs dans l’infrastructure transcontinentale d’Internet.
Une prouesse prête pour l’industrialisation
Comme dans le secteur des biotechs ou de l’énergie, les innovations télécoms sont nombreuses à ne jamais quitter le stade du laboratoire. Beaucoup d’idées prometteuses ne sont tout simplement pas exploitables dans les conditions réelles et restent pour toujours au stade de perspectives.
Il est donc particulièrement intéressant de constater que les chercheurs du NICT ont réalisé leur expérience en gardant en tête – sur de nombreux aspects – les contraintes industrielles et économiques.
Un exploit avant tout technologique
Bien entendu, l’exploit est avant tout technologique. Pour transmettre les données à cette vitesse inédite, la nouvelle fibre optique embarque quatre faisceaux par câble, contre un seul pour les fibres traditionnelles.
Pour maximiser la bande passante, la lumière est décomposée en pas moins de 552 longueurs d’ondes différentes qui se déplacent simultanément dans la fibre avec un système complexe de « retard artificiel » pour synchroniser l’ensemble des photons. Tous les 70 kilomètres, des amplificateurs dopés au thulium et à l’erbium captent et réémettent le signal dans un nouveau segment de fibre, permettant à la vitesse d’être maintenue sur de longues distances.
Un amplificateur de signal
Crédit : NICT
Malgré la complexité accrue des installations électroniques en bout de chaîne et des amplificateurs de signal, les nouveaux câbles ont le même diamètre externe que ceux utilisés dans les installations actuelles. Il sera donc possible de les installer en remplacement des fibres déjà tirées. En effet, les mêmes équipements de pose pourront être utilisés et le plus gros des infrastructures réutilisé.
En outre, même si cette nouvelle fibre ultra haut débit nécessite des amplificateurs relativement rapprochés, le principe de fibre optique « active » n’est pas nouveau. Dans les installations de très longue distance – comme les câbles transocéaniques – les opérateurs ont déjà pris l’habitude d’installer des dizaines d’amplificateurs de signal. Seules les lignes dont la distance ne dépasse pas les quelques centaines de kilomètres sont aujourd’hui câblées avec des fibres totalement passives (sans amplificateurs).
Intégrer ces modules tous les 70 kilomètres ne présentera donc pas de difficulté majeure – et l’expérience du NICT a montré que les tronçons peuvent être mis bout à bout sur plusieurs milliers de kilomètres sans nuire à la vitesse de transfert du système.
Quel impact pour l’Internet mondial ?
Toute amélioration des vitesses de transmission de données est bonne à prendre.
L’année dernière, lorsque la moitié de l’humanité s’est confinée, l’usage de bande passante internet a littéralement explosé… sans pour autant que le réseau mondial ne s’effondre. Comment un tel changement dans nos comportements a-t-il pu avoir lieu sans que nos infrastructures ne soient débordées ? La prouesse n’a rien d’un miracle : c’est le résultat d’un effort continu des industriels pour anticiper l’augmentation de la demande.
Depuis les années 2000, le nombre d’utilisateurs d’Internet a crû de +600 % en Europe, + 2 658 % en Amérique Latine et +2 316 % en Asie – région qui compte désormais plus de 2,7 milliards d’internautes. Le taux de pénétration dépasse les 65 % à l’échelle de la planète, et atteint même les 93,9 % en Amérique du Nord.
En parallèle, le temps d’utilisation quotidien d’Internet n’a fait qu’augmenter.
Evolution du temps moyen passé en ligne par personne, chaque jour
Infographie : Statista
Cette croissance simultanée du nombre d’utilisateurs et de la consommation de données per capita fait peser un poids exponentiel sur les infrastructures. Les opérateurs l’ont bien compris et mènent une course effrénée pour câbler toujours plus notre planète. Le monde est désormais recouvert d’une multitude de segments qui, tels un véritable réseau autoroutier mondial, assurent la circulation des flux de données entre les continents.
Principaux câbles sous-marins actuellement en fonction
Source : SubmarineCableMap.com
Augmenter la vitesse de transmission dans les fibres revient à augmenter la vitesse de circulation sur l’autoroute sans avoir à construire et maintenir de nouvelles voies. Il devient possible, à infrastructure égale, de faire passer plus de données. En période creuse, cela signifie que de nouveaux usages très demandeurs de bande passante pourront émerger, comme des vidéoconférences en HD entre les quatre coins du monde, des opérations médicales pilotées en réalité augmentée à l’autre bout de la planète, ou encore des systèmes informatiques mis à jour en temps réel sur des millions d’appareils.
De nouveaux usages très demandeurs de bande passante pourront émerger
En période de pic de consommation, cette bande passante additionnelle permettrait de fournir à un plus grand nombre d’utilisateurs un service certes dégradé, mais acceptable selon les standards actuels.
Empêcher un engorgement de l’Internet mondial est le défi du quotidien des grands opérateurs. Dans leur quête incessante de toujours plus de bande passante entre les continents, une fibre à 300 Tb/s leur apportera des années d’avance sur l’évolution de la demande.
2 commentaires
Ok
OK pour votre article. Quid à présent des valeurs dans lesquelles investir ??