Accueil Energies et transports Le vrai coût de la transition énergétique : toujours plus d’Etat !

Le vrai coût de la transition énergétique : toujours plus d’Etat !

par Etienne Henri
transition énergétique

Ces derniers jours, toutes les questions qui se sont posées au sujet de la transition énergétique ont eu la même réponse : plus d’Etat. Plus d’Etat dans EDF… Plus de règlementations du côté des véhicules thermiques… Plus de mesures zéro carbone pour le transport aérien… Voici trois changements de règles du jeu et leurs conséquences pour vous.

Comment assurer la survie d’EDF, étranglée entre le passif d’une soixantaine de réacteurs nucléaires – dont la moitié à l’arrêt –, des prix de vente artificiellement bas et des investissements obligatoires ? En la nationalisant.

Trois changements dans les règles du jeu pour quelles conséquences ?

Comment les constructeurs automobiles doivent-ils décider de ce qu’ils mettent à leur catalogue en termes de motorisation ? En suivant des nouvelles réglementations Européennes.

Le transport aérien est déjà intégré au mécanisme de compensation des émissions de CO2 ? Ce n’est pas assez, il faut le brider encore plus… Pour ce faire, quoi de mieux que de lui retirer les quotas de CO2 gratuits dès 2025. Donc avant le reste de l’industrie (2030). Et, comme ce ne sera pas assez, les vols extra-européens seront à leur tour soumis au marché carbone européen.

Faisons le point sur ces trois changements de règles du jeu et les conséquences qu’ils auront pour vous en tant que citoyen, contribuable et investisseur.

Vers une nationalisation d’EDF

J’évoquais déjà cette rumeur auprès de mes abonnés avant l’élection présidentielle. Je leur expliquais que, si elle avait été à l’époque balayée d’un revers de main, elle risquait fort de ressurgir une fois le cycle électoral terminé…

EDF est un dossier piégé depuis son entrée en Bourse

Il faut croire que j’étais encore trop optimiste dans le calendrier puisque, avant même la conclusion des législatives, elle est revenue sur le devant de la scène. Et cette fois-ci, les indices sont semés par les principaux intéressés… Agnès Pannier-Runacher, la ministre déléguée à la Transition énergétique, s’est fendue sur Franceinfo d’un laconique « le sujet n’est pas tranché ». De son côté, pour préparer le terrain, Jean-Bernard Lévy, le P-DG d’EDF, a pris rendez-vous avec les différentes organisations syndicales du groupe.

Une sortie de Bourse aurait, à n’en pas douter, un petit air de victoire pour les syndicats opposés à l’économie de marché. Voir les actionnaires dépossédés au profit d’une détention étatique serait un symbole anticapitaliste fort. Et, avec un cours de Bourse divisé par 10 en quinze ans, le moins que l’on puisse dire est que les actionnaires ne se sont pas « enrichis en dormant » !

Que faire de cette information ?

EDF est un dossier piégé depuis son entrée en Bourse. L’Etat est un coactionnaire encombrant dont l’affectio societatis est des plus ténus. Jouer l’OPA est un exercice ultra-spéculatif qui implique de rentrer sur le dossier juste avant que les grosses mains n’apprennent les modalités du rachat d’actions des petits porteurs…

Les véhicules thermiques interdits dès 2035

Le Parlement européen a tranché, c’est finalement en 2035 que les constructeurs automobiles devront retirer de leur catalogue tous les véhicules émettant du CO2 lors de leurs déplacements. Ainsi est programmée la fin des voitures roulant à l’essence ou au gazole. Et ce, même si elles disposent d’une motorisation hybride. Les seules options disponibles seront les batteries électriques et l’hydrogène.

Le Parlement européen a tranché, en 2035, les véhicules à moteur thermique seront interdits

En anticipant le renouvellement naturel du parc qui aurait pu se décarboner spontanément au fil de l’arrivée des innovations souhaitées par les consommateurs, l’Europe va introduire un fort biais sur le marché. Là où l’achat des véhicules propres aurait pu être encouragé avec des subventions importantes, le Parlement introduit une date butoir qui, connue à l’avance, va modifier le comportement des acheteurs.

La question est maintenant de savoir si, avant cette date, les modèles thermiques auront déjà été abandonnés par les acheteurs de véhicules neufs. Cela signifierait que, à l’instar des appareils électroniques obsolètes, ils garderont une valeur d’usage chez leurs propriétaires avant d’être progressivement mis au rebus. Dans le cas contraire, ils deviendront une denrée rare qui s’arrachera sur le marché de l’occasion, et nous pourrions être dans la situation paradoxale où les véhicules thermiques d’occasion se vendent pour plus cher que leur prix de vente initial.

En tout état de cause, le marché automobile va être tiré vers le haut de gamme avec des véhicules toujours plus techniques et évolués. L’équation de la rentabilité risque d’être complexe pour les constructeurs du fait de la baisse prévisible des volumes à mesure que les citoyens les moins solvables seront exclus du marché. Pour autant, les équipementiers spécialisés dans les systèmes de puissance et d’autonomie devraient retrouver des couleurs.

Que faire de cette information ?

La voiture deviendra un produit de plus en plus rare. La chaîne de valeur du secteur automobile risque d’être profondément bouleversée. Une question demeure : dans quinze ans, un véhicule thermique tiendra-t-il plus de la télévision cathodique qui encombre le grenier ou de la Rolex que les acheteurs s’arrachent ? L’avenir le dira…

Transport aérien : ce que cachent les mesures zéro carbone

Le transport aérien est un bouc émissaire bien pratique. Parce qu’il symbolise la liberté, l’opulence, la modernité et la mondialisation, il est la cible idéale des mesures de lutte contre le changement climatique.

Peu importe qu’il représente moins d’émissions de CO2 que le numérique, paré de toutes les vertus. Peu importe qu’un passager dans un avion moderne ne consomme l’équivalent que de 2l/100 km, soit l’équivalent d’une voiture à essence chargée de trois à quatre passagers. Peu importe que, sur les billets à bas coûts tant décriés, la majorité du prix soit déjà constituée de taxes.

L’important, pour la classe politique, est de montrer que tout est fait pour limiter son utilisation. Intégrer les vols européens au marché du carbone n’était visiblement pas assez, il faut désormais mettre cette industrie au ban de notre économie en la privant, d’ici trois ans, de son quota d’émissions de CO2 gratuites. Ce faisant, le Parlement crée un précédent dangereux : le mécanisme de compensation des émissions de CO2 avait pour lui sa neutralité. Parce qu’une tonne de CO2 a le même effet quelle que soit son origine, fixer un prix sur un marché commun avait du sens.

Le secteur est la cible idéale des mesures de lutte contre le changement climatique

L’économie réelle, dont la fonction est de gérer la finitude de nos ressources, pouvait jusqu’ici s’organiser et privilégier, par le jeu de l’offre et de la demande, les activités les plus productrices de richesses par tonne de CO2 émise. L’échange d’argent, qui résume en un chiffre la valeur accordée par les acteurs économiques à un bien ou un service permettait de répondre à chaque instant à la question « aujourd’hui, vaut-il mieux faire voler un avion, couler une dalle de béton ou faire rouler un tracteur ? » Les mécanismes de marché libre ont des défauts, mais ils ont pour avantage irremplaçable d’adapter la production en fonction des besoins réels des entreprises et des citoyens. Et non ceux imaginés par nos dirigeants. Introduire des biais dans le prix unique de la tonne de CO2, c’est empêcher le marché de faire son travail.

En outre, ceux qui déplorent l’impunité fiscale du transport aérien seront déçus d’apprendre que la situation ne changera pas. Contrairement à ce qui est souvent prétendu, les vols sont déjà taxés. Ils le seront simplement un peu plus et l’aviation redeviendra un luxe inabordable pour certains consommateurs à la marge de la solvabilité. Même au nom de la « justice sociale », l’effet sera contre-productif.

Enfin, le calendrier de cette mesure politique est des plus malheureux : les compagnies aériennes ont déjà des engagements forts pour réduire leurs émissions en utilisant de plus en plus le carburant SAF (Sustainable Aviation Fuel) et, côté constructeurs, en travaillant d’arrache-pied sur l’avion à hydrogène. Déjà financièrement exsangues depuis la crise du COVID-19, augmenter la valeur faciale des billets n’aidera pas cette industrie à financer sa transition énergétique.

Que faire de cette information ?

« Quand on taxe le lait, ce ne sont pas les vaches qui payent. » Si vous prenez l’avion, attendez-vous à voir le tarif de vos billets augmenter dans les prochaines années. Vous vous tenez à l’écart de ce mode de transport ? Si vous êtes contribuable européen, vous payerez aussi…

Bien évidemment, si les consommateurs et contribuables peuvent déplorer ces décisions qui vont mécaniquement restreindre leurs choix et les appauvrir, les actionnaires des entreprises bénéficiaires de ces vases communicants peuvent se frotter les mains…

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